T outes ces visites mettent évidemment le touriste mal à l’aise, non pas, pour ce qui nous concerne, dans une optique de repentance systématique, mais elles nous poussent à des réflexions sur la condition humaine. Au même moment en Europe, ou plus près, au Nord des USA ou au Canada, les petits paysans devaient travailler tout autant, simplement pour survivre car les temps étaient durs et  la subsistance jamais assurée. L’essentiel des efforts s’orientait vers la satisfaction des besoins les plus élémentaires : manger, s’habiller, avoir un toit, se soigner et essayer d’élever ses enfants.

Si les conditions d’existence étaient les mêmes pour les pauvres de tous les pays, la grande  différence, irréductible, est simple et terrible : la liberté. Un pauvre paysan français pouvait toujours quitter sa terre  et tenter sa chance, vers la Terre promise ou le Nouveau monde. Un esclave, comme un serf autrefois en Europe, était lié à son maître sans aucun espoir de partir, sauf à risquer sa vie en s’enfuyant, ce qui était quasiment suicidaire vues les difficultés naturelles du pays et la force du système esclavagiste. La mort était inéluctable s’il était capturé, parfois même précédée de la torture, pour donner l’exemple.

Le Musée de l’Esclavage de Whitney a produit ou permis la mise à disposition du public d’une œuvre considérable de connaissances sur une phénomène qui a été longtemps occulté.

Dans les Etats du Sud, même si on ne plus parler de racisme, même si les Blancs et les Noirs vivent ensemble, on n’en est pas encore à une reconnaissance générale de ce que fut l’esclavage. C’était normal après la Guerre de Sécession, mais le mouvement d’émancipation a été très lent puisqu’il a fallu attendre les grandes lois de John F. Kennedy, poussé par Martin Luther King pour que la ségrégation cesse officiellement le 2 juillet 1964. Les lois furent signées par Johnson après l’assassinat de Kennedy le 22  novembre 1963.

Grâce à ce musée, qui reste étrangement le seul à notre connaissance, on a une idée plus précise et plus dure encore de la réalité de l’esclavage.
Les maîtres exerçaient une indifférence absolue aux esclaves en les considérant un peu comme des animaux, pas comme de vrais humains.

On peut se demander si cette indifférence était de même nature qu’en Europe, lorsque les aristocrates ne craignaient pas de s’exposer dans des scènes intimes ou de discuter de thèmes très personnels devant leurs domestiques. La réponse est peut-être identique. Même si c’était difficile, un domestique pouvait toujours changer d’employeur. Un esclave non. Et en Europe, les maîtres n’avaient pas le pouvoir de vie et de mort.

Le musée abrite un mémorial – le Mur de l’Honneur - où sont répertoriés les prénoms des 200 000 esclaves ayant vécu et travaillé en Louisiane avant 1820 et qui ne figuraient sur aucun registre. C’est le résultat d’une enquête menée en 1930 auprès des témoins nés dans les années 1850 et qui avaient été esclaves. Le Federal Wrighter’s Project a réuni des archives conséquentes sur leurs noms, leurs lieux de travail et leur descendance. Leurs témoignages dressent un tableau irréfutable de la réalité de l’esclavage.

Un jardin est dédié aux enfants morts en bas âge, le plus souvent sans nom. The Field of Angels commémore les 2200 enfants esclaves morts en Louisiane dans les plantations. La sculpture de l’Ange est de Rod Moorhead.

C’est encore le musée qui a commandé à l’artiste Woodrow Nash la série des « Enfants esclaves de jadis ».





Matériel : Nikon D4, objectifs Nikkor : 1,4/105 mm, 2,8/14-24 mm et Sigma Art, 1,4/35 mm.

Développement des RAW sur Capture One 11 Clichés indiqués AM = Annick Michel




 
La plantation Whitney et 
le Musée de l’Esclavage
2. Les Esclaves